Rapport mondial 2019 sur les talents en IA

Résumé

Tout porte à croire que l’offre de talents de haut niveau en intelligence artificielle (IA) ne répond pas à la demande. Pourtant, il y a peu de visibilité sur la rareté de ce talent ou sur sa répartition dans le monde. Ce rapport résume la deuxième enquête de Element AI sur la portée et l’étendue de la réserve mondiale de talents en IA. Notre recherche s’appuie sur trois sources de données principales. Tout d’abord, pour avoir une idée des chercheurs qui font avancer le domaine, nous avons passé en revue les publications de 21 grandes conférences scientifiques dans le domaine de l’IA et avons analysé les profils des auteurs. Ces données s’ajoutent à celles de notre rapport de 2018, qui ne portait que sur trois conférences. Ensuite, nous avons analysé les résultats de plusieurs recherches ciblées sur les médias sociaux, qui nous ont montré combien de personnes déclarent détenir un doctorat et posséder des compétences de haut niveau en IA. Enfin, nous nous sommes tournés vers des rapports externes et d’autres sources secondaires pour nous aider à mettre nos conclusions en contexte et à mieux comprendre le bassin de talents dans un paysage mondial de l’IA qui évolue rapidement.  

Nos résultats montrent que 22 400 personnes ont participé à une ou plusieurs des plus importantes conférences dans le domaine de l’apprentissage machine en 2018, soit 36 % de plus que depuis 2015 et 19 % de plus que l’an dernier seulement. Le nombre de publications évaluées par les pairs a augmenté en parallèle, soit 25 % de plus que depuis 2015 et 16 % de plus qu’en 2017.

Il est à souligner que les femmes étaient sous-représentées car elles ne constituent que 18 % des chercheurs qui publient dans ces conférences. Par ailleurs, nous avons constaté que le bassin de talents en IA est très mobile : environ un tiers des chercheurs travaillent pour un employeur situé dans un pays différent de celui où ils ont obtenu leur doctorat. Notre analyse a montré qu’environ 18 % des auteurs qui ont publié leurs travaux lors des 21 conférences incluses dans cette étude, soit environ 4 000 personnes, ont contribué à une recherche qui a eu un impact majeur sur l’ensemble du domaine, mesuré par le nombre de citations au cours des deux dernières années (2017-2018). Les pays ayant le plus grand nombre de chercheurs à impact élevé (c.-à-d. ceux qui font partie des 18 %) étaient les États-Unis, la Chine, le Royaume-Uni, l’Australie et le Canada.

Une enquête complémentaire sur les profils de médias sociaux a indiqué un total de 36 524 personnes qui, au début de 2019, étaient qualifiées comme spécialistes en IA, selon nos critères de recherche. Cela représente une augmentation de 66 % en comparaison du rapport de 2018.

Les résultats de ce sondage indiquent qu’il y a eu une croissance et une expansion notables de l’expertise autodéclarée en IA et du nombre d’auteurs et d’articles scientifiques publiés lors des conférences sur l’IA. Ce domaine est incontestablement international, chaque écosystème étant caractérisé par ses propres forces et stratégies. Les pays qui se concentrent sur le développement de cette expertise contribuent à accroître le bassin mondial de talents en IA nécessaires pour faire progresser ce domaine.  

Introduction

La demande en experts en intelligence artificielle est plus forte que jamais, puisque de plus en plus d’organisations se positionnent pour profiter des avantages du déploiement de solutions d’IA. . Les algorithmes d’auto-apprentissage devraient permettre aux entreprises de mieux naviguer les enjeux complexes auxquels ils font face et d’accéder à des signaux pertinents mais jusque-là invisibles, fournissant ainsi des informations en temps réel qui aident les employés à mieux faire leur travail.

L’an dernier, avec notre première enquête sur le bassin mondial de talents, nous avons confirmé une hypothèse générale au sein de la communauté de l’IA : il est très difficile de dénicher des titulaires de doctorat expérimentés en développement de l’IA. Nous avons porté de 3 à 21 le nombre de conférences académiques qui constituaient notre échantillon de données. Nous avons enquêté sur le genre des chercheurs, le flux de talents à travers les frontières nationales et identifié quels pays, sur la base des résultats de nos analyses de 21 conférences, produisent la recherche ayant l’impact le plus important selon le nombre de citations. Parallèlement, nous avons recueilli des profils professionnels sur LinkedIn afin d’évaluer les tendances de l’expertise autodéclarée en IA. Enfin, nous avons contextualisé nos constatations en corrélant les données provenant de rapports et de sources externes.

Au sein de mon entreprise, Element AI, nous recherchons continuellement des experts techniques dans le domaine de l’intelligence artificielle et nous avons considérablement travaillé pour comprendre où se situe géographiquement les talents techniques. En tant que personne qui croit en l’importance d’un espace ouvert et dynamique pour l’IA, j’espère que la communauté trouvera dans ce rapport une ressource utile pour remédier à la pénurie de talents.

La participation à des conférences académiques augmente rapidement

La principale source de données pour cette enquête sont les conférences universitaires dans le domaine de l’apprentissage machine. Pour évaluer l’expertise, nous avons examiné les auteurs d’articles qui ont été publiés au cours de la dernière année dans le cadre de conférences universitaires internationales de premier plan dans ce domaine. Nous avons priorisé les 21 conférences suivantes1 :

  • Conférence annuelle de la section nord-américaine de l’Association for Computational Linguistics (NAACL)
  • Conférence de l’Association pour l’avancement de l’intelligence artificielle (AAAI)
  • Association for Computational Linguistics Conference (ACL)
  • Conférence sur la vision par ordinateur et la reconnaissance des formes (CVPR)
  • Conférence sur les méthodes empiriques de traitement du langage naturel (EMNLP)
  • Conférence sur la théorie de l’apprentissage (COLT)
  • Conférence sur les systèmes de traitement de l’information neuronale (NeurIPS)
  • Conférence sur l’incertitude dans l’intelligence artificielle (UAI)
  • Conférence sur la génétique et le calcul évolutif (GECCO)
  • Conférence internationale sur le traitement de l’acoustique, de la parole et du signal (ICASSP)
  • Conférence internationale sur l’intelligence artificielle et les statistiques (AISTATS)
  • Conférence internationale sur les agents autonomes et les systèmes multi-agents (AAMAS)
  • Conférence internationale sur la vision par ordinateur (ICCV)
  • Conférence internationale sur les robots et systèmes intelligents (IROS)
  • Conférence internationale sur l’apprentissage machine (ICML)
  • Conférence internationale sur l’informatique d’imagerie médicale et l’intervention assistée par ordinateur (MICCAI)
  • Conférence internationale sur la robotique et l’automatisation (ICRA)
  • Conférences internationales conjointes sur l’intelligence artificielle (IJCAI)
  • Interspeech
  • Robotique : Sciences et systèmes (RSS)
  • Conférence d’hiver sur les applications de la vision par ordinateur (WACV)

Le fait de passer de 3 conférences dans notre étude de l’an dernier à 21 cette année nous permet de brosser un portrait plus précis des chercheurs qui font progresser l’IA.

En nous basant sur les informations de publication des 21 conférences disponibles dans la Bibliographie informatique du DBLP, nous avons compté le nombre d’auteurs signataires des articles des conférences. Nous avons dénombré un total brut de 22 400 personnes uniques qui ont publié à une ou plusieurs de ces conférences en 2018.2 Pour comparer ce nombre à celui des années précédentes, nous avons recueilli des données sur les publications des 21 mêmes conférences pour 2015, 2016 et 2017.3 Une nette tendance à la croissance s’est dégagée, le nombre total d’auteurs publiés ayant augmenté de 36 % par rapport à 2015 et de 19 % par rapport à l’année dernière. La recherche s’est également intensifiée : le nombre total de manuscrits publiés à ces 21 conférences ayant augmenté de 25 % par rapport à 2015 et de 16 % par rapport à l’année précédente.  

Il est important de noter qu’un ensemble de données fondé sur des publications à des conférences internationales avec comités de lecture reflète certains partis pris: cette étude ne tient donc pas compte des publications soumises uniquement auprès de revues scientifiques. De plus, cette enquête risque d’exclure certaines communautés de recherche et de développement dynamiques, comme les laboratoires privés, les groupes de réflexion ainsi que les chercheurs et consultants indépendants, dont les travaux ne sont peut-être pas bien représentés dans les conférences universitaires internationales. De plus, ces 21 conférences se déroulent toutes en anglais, ce qui peut également entraîner la sous-représentation de certaines communautés de recherche.  

Dans le but de mieux comprendre les profils de ces chercheurs, nous avons extrait un échantillon aléatoire de 4 500 auteurs. Tirant parti d’une approche d’externalisation ouverte (crowdsourcing), nous avons ajouté les métadonnées suivantes pour chaque nom sur notre liste d’auteurs : 1) genre; 2) pays d’obtention du doctorat; 3) lieu de travail actuel; et 4) pays de leur employeur.4 L’examen minutieux des métadonnées de cet échantillon nous a permis de faire des observations sur la représentation des femmes sur le terrain, la répartition géographique des auteurs des conférences et les points chauds mondiaux de la recherche ayant la plus grande portée. Nous présentons ces résultats ci-dessous.5

Les femmes continuent d’être sous-représentées dans les publications des conférences sur l’IA

Dans le cadre d’une collaboration avec Wired l’an dernier, nous avons analysé le bassin de talents afin de déterminer quelle proportion des chercheurs en apprentissage machine étaient des femmes. Notre examen a suggéré que le domaine était encore loin d’atteindre un équilibre entre les genres : dans les trois principales conférences universitaires sur l’IA que nous avons étudiées l’an dernier, nous avons constaté que seulement 12 % des auteur.e.s étaient des femmes.

L’enquête de cette année, qui a porté sur 21 conférences universitaires, a révélé que les femmes sont également sous-représentées dans ce groupe plus large, avec un ratio global de 18 % de femmes. Selon notre enquête, ce déséquilibre entre les genres existe à la fois dans l’industrie et dans le milieu universitaire : nos données indiquent que 19 % des auteurs de conférences qui étaient dans le milieu universitaire étaient des femmes contre 16 % dans l’industrie.  

La participation des femmes au développement et au déploiement de la technologie de l’IA est une question importante, étant donné la portée potentielle de l’apprentissage machine sur l’ensemble de la société. Interviewée pour l’article de 2018 de Wired, la professeure Joëlle Pineau, qui dirige le laboratoire de recherche sur l’IA de Facebook à Montréal, a plaidé en faveur de mesures visant à accroître le nombre de femmes dans ce domaine : « Nous avons une responsabilité scientifique plus grande que dans d’autres domaines parce que nous développons des technologies qui touchent une grande partie de la population », dit-elle. Sam Altman, le PDG d’OpenAI, a fait des commentaires similaires, notant dans une récente conversation avec Kara Swisher de Recode que l’apprentissage machine est à la fois « le domaine le plus biaisé que je connaisse actuellement » en matière de genre des diplômés du doctorat et aussi le domaine « qui aura le plus d’effet sur le futur du monde où nous vivons ».

Selon le AI Index 2018 Report, publié par l’Université Stanford, les femmes sont également sous-représentées dans les cours sur l’IA et l’apprentissage machine de premier cycle universitaire : selon le rapport, le cours Introduction to AI de Stanford en 2017 était composé à 74 % d’hommes et celui de Berkeley, à 73 % d’hommes. Un pourcentage encore plus faible de femmes s’est inscrit aux cours Introduction to machine learning de ces universités, les hommes représentant 76 % des étudiants du cours de Stanford et 79 % des étudiants du cours de Berkeley. Par ailleurs, le même rapport révèle qu’aux États-Unis, la majorité des candidats (71 %) aux emplois d’IA sont des hommes.

Dans le cadre de notre étude sur les conférences académiques, nos données ont montré que les rapports entre les genres varient d’un pays à l’autre et que certains pays avaient un pourcentage d’auteures supérieur à la moyenne de 18 %, l’Espagne (26 %), Taiwan (23 %) et Singapour (23 %) en tête de notre liste. La Chine et l’Australie (22 % chacun), les États-Unis (20 %), la Suisse (19 %), le Royaume-Uni et l’Italie (18 % chacun) et l’Inde (17 %) figurent également parmi les dix premiers pays ayant le pourcentage le plus élevé d’auteures.

Dans certains pays, le pourcentage de chercheuses était plus élevé que la moyenne – la proportion d’auteures iraniennes était de 71 %, par exemple – mais la cohorte globale était trop petite pour être incluse dans l’analyse. En chiffres absolus, les États-Unis sont en tête des pays ayant le plus grand nombre d’auteures, suivis par la Chine, le Royaume-Uni, l’Allemagne, le Canada, la France, l’Australie, l’Inde, l’Italie et Singapour.

Les pays qui forment des experts de l’IA sont également des leaders en matière d’emploi

Les données de nos chercheurs nous ont permis de faire quelques observations sur l’endroit où les auteurs publiés reçoivent leur formation. Tout d’abord, les États-Unis continuent d’accorder des doctorats à des personnes qui sont des rédacteurs productifs en matière de nombre de publications acceptées : parmi notre échantillon d’auteurs de conférences, plus de 44 % ont obtenu leur doctorat aux États-Unis. Les auteurs formés en Chine représentaient près de 11 % des auteurs, suivis du Royaume-Uni (6 %), de l’Allemagne (5 %) et du Canada, de la France et du Japon (4 % chacun).

Les données sur l’emploi montrent une répartition géographique similaire. Notre enquête a montré que les employeurs américains continuent d’attirer des chercheurs. 46 %  de l’échantillon sélectionné travaillaient effectivement pour un employeur établi aux États-Unis. La Chine, où plus de 11 % de notre échantillon travaille, se classait deuxième sur la liste des pays, suivie du Royaume-Uni (7 %). Le Canada, l’Allemagne et le Japon représentaient chacun 4 % de l’échantillon. Dans l’ensemble, les 18 plus grands pays représentaient 94 % des auteurs, les 6 % restants étant répartis entre différents pays.6 Les cinq premiers pays (les États-Unis, la Chine, le Royaume-Uni, l’Allemagne et le Canada) représentaient 72 % des auteurs.  

La grande majorité de l’échantillon tiré des personnes ayant assisté à des conférences (77 %) travaillaient dans le milieu universitaire, tandis que 23 % travaillaient dans l’industrie. Certains des plus grands acteurs du secteur privé continuent d’attirer des talents à leur siège social. Par contre, de plus en plus d’entreprises ouvrent des bureaux à l’extérieur du pays où leur siège social est implanté et invitent les experts à y travailler, ce qui leur permet de demeurer dans le pays où ils ont étudié.

Pour évaluer l’emplacement du lieu de travail de l’expert aux fins du présent rapport, nous avons examiné l’emplacement du siège social de l’entreprise, et non le pays où la personne travaillait et vivait physiquement. Donc, si quelqu’un a fait son doctorat dans une institution française et travaille maintenant pour Google à son bureau de Paris, nos données montreraient qu’elle a été formée en France mais qu’elle travaille pour une entreprise américaine, puisque Google est basé aux États-Unis. Dans un tel scénario, la présence de l’entreprise étrangère apporterait certains avantages au pays d’accueil, notamment l’investissement local, la formation et le fait que l’expertise est encore physiquement située à l’intérieur du pays. Pourtant, l’entreprise étrangère conserverait toujours la propriété intellectuelle  créée localement. Bien que nous soyons conscients que cette méthode de comptage a déprécié les chiffres pour de nombreux écosystèmes, principalement en faveur des États-Unis, nous estimons qu’elle donne une meilleure représentation de la manière dont les talents circulent dans le monde.

Le pays qui forme un doctorant n’est pas toujours le pays qui en bénéficie

Les données issues des conférences nous ont également donné un aperçu de l’endroit où les chercheurs se déplacent pour travailler après l’obtention de leur doctorat. Dans l’ensemble, nous avons constaté que près du tiers (27 %) des chercheurs travaillaient pour un employeur établi dans un pays différent de celui où ils avaient reçu leur formation. Parmi les pays comptant au moins 150 auteurs, le pourcentage était encore plus élevé (32 %). La carte globale de ces mouvements est complexe et l’histoire derrière chacun d’eux est inévitablement unique et personnelle. Néanmoins, ces données nous ont permis de faire quelques observations sur le flux de talents en IA à travers les frontières nationales.7

Premièrement, nos données suggèrent que certains pays sont particulièrement attrayants pour les chercheurs dans le domaine de l’apprentissage machine. Selon notre enquête, ce sont les employeurs établis aux États-Unis qui avaient le plus de chances d’attirer des chercheurs formés à l’étranger. La Chine était le deuxième pays le plus susceptible d’attirer des chercheurs ayant obtenu leur doctorat dans un autre pays, ce qui représente près du quart du nombre de chercheurs que les États-Unis ont réussi à attirer en nombre absolu. Nous supposons que plusieurs facteurs différents pourraient contribuer à cette observation, y compris la disponibilité des emplois dans chaque pays.

Selon nos données, dix pays avaient un pourcentage plus élevé de chercheurs entrants que de chercheurs sortants : Taïwan, la Suède, la Corée du Sud, l’Espagne, les États-Unis, la Suisse, la Chine, le Japon, le Royaume-Uni et l’Australie.8 La Suisse et la Suède sont en tête de liste pour ce qui est de l’accueil d’experts venus d’ailleurs, avec respectivement 50 % et 49 % de leur bassin de talents formés à l’étranger. Le Royaume-Uni arrive en troisième position, avec 44 % de ses chercheurs ayant obtenu leur doctorat à l’étranger, d’après nos données. Dans les projets futurs, nous espérons explorer les raisons pour lesquelles certains pays ont reçu un pourcentage plus élevé de chercheurs entrants; nous pensons que cela pourrait être dû à une série de raisons différentes, y compris la disponibilité des emplois et le retour des chercheurs dans leur pays d’origine.

Ces données nous ont également permis de comparer les entrées et sorties de talents en pourcentage de l’ensemble des talents dans chaque pays. D’une part, l’afflux de talents représente le nombre de personnes qui ont travaillé dans le pays x, mais ont obtenu leur doctorat dans le pays y, divisé par le nombre total de talents en IA dans le pays. Nous postulons que cette mesure montre à quel point un écosystème est capable d’exercer une attraction sur le talent.  

Les départs de talents, quant à eux, représentent le nombre de personnes qui ont obtenu leur doctorat dans le pays x, mais qui travaillent maintenant pour un employeur basé dans le pays y, divisé par le nombre total de personnes qui ont obtenu leur doctorat dans le pays x. En examinant le ratio des personnes qui quittent le pays pour travailler pour une entreprise étrangère par rapport à celles qui restent dans le pays après leur doctorat, cette mesure nous donne un aperçu des capacités du pays à garder ses talents.

Pour voir comment les pays se comparent dans cette dynamique d’aller-retour, nous avons calculé les flux entrants et sortants moyens de tous les pays, puis nous avons examiné la distance de chaque pays par rapport aux flux entrants moyens et à la distance de ces flux sortants moyens. Nous les avons représentés avec les entrées de talents sur l’axe des x et les sorties de talents sur l’axe des y, où les unités représentent le nombre d’écarts-types par rapport à la moyenne. Ces valeurs nous ont permis de classer les pays dans les quatre groupes distincts décrits ci-dessous.  

L’Australie, l’Espagne, la Suède et Taïwan ont tous connu plus d’entrées et moins de sorties, en proportion de la réserve de talents du pays, que la moyenne. Cela signifie que ces pays réussissent relativement mieux à la fois à retenir les talents qu’ils ont formés chez eux et à attirer des talents d’autres écosystèmes. Nous appelons ces écosystèmes des pays invitants. En revanche, nous considérons la France et Israël comme des pays producteurs, parce qu’ils ont vu moins d’entrées et plus de sorties, en proportion de la réserve de talents du pays, que la moyenne. Ces pays ont connu des flux sortants légèrement supérieurs à la moyenne, ce qui signifie qu’ils ont été classés dans la catégorie des pays producteurs par une faible marge.  

Selon nos données, les États-Unis ont enregistré moins d’entrées et de sorties de talents que la moyenne, en proportion de l’ensemble du bassin de talents du pays. Cela ne reflète pas la taille de son vivier de talents : en chiffres absolus, les États-Unis restent le premier pôle d’attraction mondial des talents. Cela témoigne plutôt de la stabilité relative de son bassin de talents. Étant donné que notre étude définit l’emplacement d’un chercheur en fonction du siège social de l’entreprise où il travaille, on pourrait considérer que ces résultats gonflent le nombre de chercheurs aux États-Unis. Cela s’explique par le fait que bon nombre des entreprises qui établissent des laboratoires dans le monde entier ont leur siège social aux États-Unis. Outre les États-Unis, la même tendance a été observée en Chine, en Allemagne, en Inde, en Italie, au Japon et en la République de Corée. Nous appelons ces écosystèmes des pays ancrés.

Enfin, dans plusieurs pays, les flux entrants et sortants ont été plus importants que la moyenne, en proportion de la réserve de talents du pays. Ces pays réussissent à attirer des travailleurs formés à l’étranger tout en formant plus de diplômés de troisième cycle que la moyenne. Ces écosystèmes, que nous appelons les pays plateformes, comprennent le Canada, les Pays-Bas, Singapour, la Suisse et le Royaume-Uni.

Les données des conférences que nous avons analysées ont également mis en lumière des échanges de talents notables entre certains pays. Les échanges entre la Chine et les États-Unis ont été particulièrement intenses, aucun des deux pays n’ayant réalisé de gains notables par rapport à l’autre : nous avons constaté qu’environ 500 experts de notre base de données de 22 400 chercheurs avaient obtenu leur doctorat en Chine et avaient ensuite travaillé pour un employeur américain, et que 500 autres avaient obtenu leur doctorat aux États-Unis avant de partir travailler pour un employeur établi en Chine. Un phénomène similaire a été observé entre les États-Unis et le Royaume-Uni, où nous avons trouvé environ 325 experts déplacés des États-Unis vers le Royaume-Uni, avec à peu près le même nombre allant dans l’autre sens.  

Comme les données provenant des conférences ne nous disent rien sur la nationalité d’un chercheur, nous ne savons pas combien de chercheurs viennent de l’étranger aux États-Unis (ou dans tout autre pays) pour obtenir leur doctorat, puis restent ou partent. Toutefois, nous savons que, dans l’ensemble, les universités américaines accueillent un grand nombre d’étudiants de l’étranger. En 2015, par exemple, les étudiants étrangers ont obtenu environ le tiers des diplômes d’études supérieures en sciences et en génie décernés aux États-Unis, et 76 % de ces diplômés ont déclaré qu’ils prévoyaient rester au pays. Dans certaines universités, le pourcentage d’étudiants étrangers est nettement plus élevé : à la Tandon School of Engineering de l’Université de New York, par exemple, 80 % des étudiants diplômés viennent de l’étranger.

Cette tendance se reflète également dans les cohortes de titulaires d’un doctorat en informatique des universités américaines. Sur la période 2012-2015, 7 851 étudiants étrangers ont obtenu un doctorat dans une institution américaine dans les domaines des mathématiques ou de l’informatique, selon la National Science Foundation des États-Unis. De ce groupe, plus de 79 % ont dit qu’ils avaient l’intention de rester aux États-Unis, et 53 % avaient des plans précis pour y rester. Il semble donc que de nombreux ressortissants non américains s’installent aux États-Unis pour y faire leur doctorat (ou plus tôt) et y restent ensuite pour y travailler. Ces migrations de talents à un stade précoce, qui se produisent vraisemblablement d’un pays à l’autre et qui ne sont pas prises en compte dans nos données, indiquent probablement qu’il y a encore plus de flux de talents au-delà des frontières nationales que ne le montre cette enquête.  

Les États-Unis, la Chine, le Royaume-Uni, l’Australie et le Canada mènent la recherche à fort impact.

L’étude de cette année a révélé que le nombre total d’auteurs aux conférences universitaires internationales les plus importantes a augmenté de 19 % par rapport à l’an dernier. Dans le but d’évaluer l’impactque ces auteurs ont sur une période récente, nous avons analysé les citations pour chacune de leurs publications de 2017 et 2018.9 Nous avons constaté que 18 % d’entre eux, soit environ 4 000 personnes, font de la recherche qui a un impact notable sur l’ensemble du domaine, selon les citations reçues au cours des deux dernières années. Il s’agit d’experts en intelligence artificielle qui publient les articles les plus cités lors des conférences universitaires les plus prestigieuses et dont les connaissances sont suffisamment approfondies, à notre avis, pour continuer à apporter des contributions substantielles dans ce domaine. Ces experts sont également une source potentielle de talents appliqués pour les équipes qui travaillent à mettre la théorie en pratique.  

Les données de nos conférences ont montré que ces chercheurs étaient plus concentrés dans certains pays que dans d’autres. Les cinq premiers pays pour le nombre total de ces chercheurs étaient les États-Unis (1 095), suivis par la Chine (255), le Royaume-Uni (140), l’Australie (80) et le Canada (45).

La situation change quelque peu lorsque l’on considère les chercheurs qui font le travail à fort impact en pourcentage du nombre total de chercheurs en IA dans un pays donné. Il s’agit de pays où un pourcentage plus élevé que la moyenne de la réserve locale de talents apporte d’importantes contributions au domaine, ce qui donne à penser que ces pays font peut-être quelque chose de bien lorsqu’il s’agit de former des talents de haut niveau. L’Australie arrive en tête, avec 18 % de l’ensemble de ses auteurs publiant des ouvrages à fort impact, suivie des États-Unis, du Royaume-Uni et de la Chine (13 % chacun), de la Suisse (11 %), de Singapour (9 %), de la Suède et de l’Espagne (8 % chacun) et d’Israël, du Canada et de l’Italie (7 % chacun).   

Dans tous les pays, la recherche ayant le plus d’impact était plus susceptible de provenir du milieu universitaire que de l’industrie, mais pour certains plus que pour d’autres.10 La Chine était le pays où la recherche à fort impact était la plus susceptible de provenir du milieu universitaire (90 %), suivie de l’Italie (86 %), des États-Unis (84 %), de l’Allemagne (83 %) et de Taïwan (81 %). La France a été le pays où le pourcentage le plus élevé de recherche à fort impact provient de l’industrie (30 %), suivie par l’Inde et Israël (29 % chacun), l’Espagne (28 %) et le Royaume-Uni (27 %).  

Les données provenant de réseaux sociaux suggèrent qu’un plus grand nombre de personnes s’identifient comme experts en IA

Les données tirées des conférences ont révélé une augmentation notable, d’une année à l’autre, du nombre d’auteurs et d’articles publiés à 21 des plus importantes conférences universitaires dans le domaine de l’intelligence artificielle. Pour tenter de déterminer si le marché de l’emploi se développait en parallèle, nous avons fait une recherche sur LinkedIn, le site de réseautage professionnel le plus utilisé dans le monde.

Dans notre dernier rapport sur les talents, nous avons également analysé les résultats de plusieurs recherches ciblées de LinkedIn afin d’avoir une idée du vaste bassin de talents. Comme nous l’avons fait pour le rapport de l’année dernière, nous avons défini cette année le « talent » comme étant des personnes qui ont fait la preuve de leurs compétences techniques en apprentissage machine, de plusieurs années d’expérience professionnelle et qui peuvent collaborer et prospérer dans un environnement interdisciplinaire. Ces personnes devraient être capables de repérer un problème qui peut être résolu avec des techniques modernes d’apprentissage machine, de concevoir et de mettre en œuvre cette solution à partir de zéro, puis d’optimiser la solution pour travailler efficacement.

Pour saisir les profils de ces experts sur LinkedIn, nous avons commencé par définir nos paramètres de recherche de manière à inclure les titres de postes suivants : informaticien, chercheur, ingénieur en apprentissage machine, chercheur en apprentissage machine et analyste de données.11 Notre recherche a également été conçue pour ne recenser que les personnes titulaires d’un doctorat. Bien qu’un doctorat ne soit pas une exigence objective pour être un expert en IA, nous avons travaillé en partant de l’hypothèse qu’il s’agit toujours d’un substitut utile aux compétences hautement techniques requises pour être qualifié de spécialiste. Enfin, les individus doivent avoir décrit leur travail comme incluant l’« apprentissage machine ».

D’après ces recherches, notre sondage a révélé que 36 524 personnes au total se sont qualifiées comme spécialistes de l’IA autodéclarés. L’an dernier, cependant, notre enquête sur LinkedIn indiquait qu’il y avait 22 064 experts dans le monde. Cela représente une augmentation de 66 % en comparaison avec le rapport de 2018.

Comme l’an dernier, notre enquête de 2019 a révélé que les spécialistes de l’IA qui utilisent LinkedIn sont concentrés aux États-Unis, au Royaume-Uni, au Canada, en France et en Allemagne. Pourtant, ce ne sont pas ces pays qui, dans les données de LinkedIn, ont connu les plus fortes augmentations par rapport à l’année dernière : l’Italie, la Tunisie, Israël, l’Estonie et l’Argentine ont connu la plus forte croissance relative (voir infographie ci-dessus).  

Notre échantillon de LinkedIn indique que ces personnes ont été formées dans diverses disciplines universitaires. L’informatique, dont 28 % des étudiants ont indiqué qu’elle était leur discipline universitaire, était le domaine de prédilection. Ce pourcentage était plus élevé dans certains pays, dont la France (47 %) et la Chine (44 %). De même, certains pays étaient surreprésentés dans d’autres disciplines. Prenons l’exemple de la physique : 9 % de tous les experts ont dit qu’ils étaient formés en physique, mais en Allemagne, c’était 28 %. Un autre exemple est celui des mathématiques et des statistiques. Dix-huit pour cent ont indiqué qu’il s’agissait de leur discipline universitaire, une proportion qui a bondi à 27 % des profils basés aux États-Unis et à 35 % des profils basés en Russie.12

Ces données comportent d’importantes mises en garde. Tout d’abord, toutes les informations sur LinkedIn sont autodéclarées : les individus choisissent d’accéder au site et décrivent ensuite leur formation, leur expérience et leur travail actuel dans leurs propres mots. Deuxièmement, bien qu’il ait une large portée, certains pays sont mal représentés sur le site. Par exemple, LinkedIn rapporte que quelque 144 millions d’Américains ont actuellement un profil sur LinkedIn, ce qui représente plus de 44 % de la population américaine. LinkedIn est également largement utilisé au Canada, où environ 38 % de la population serait enregistrée sur le site. En Russie, en revanche, le taux de pénétration n’est que de 5 %. En Chine, un acteur majeur de l’apprentissage machine, le taux de pénétration est encore plus faible à 3 %.  

Malgré ces particularités, nous avons constaté que dans les pays où LinkedIn est le plus largement utilisé, l’activité peut donner un aperçu des changements dans la taille et l’intérêt du domaine de l’IA. Dans le cas de ce sondage, nous avons constaté une augmentation importante de l’expertise autodéclarée en apprentissage machine. Nous croyons que cela reflète probablement l’expansion du bassin de talents propulsée par un marché qui valorise de plus en plus les compétences et l’expertise en intelligence artificielle. Bien qu’il puisse y avoir un élément de repositionnement de marque reflété dans ces données, nous avons tenté de contrôler cette possibilité en effectuant des recherches ciblant des besoins éducatifs spécifiques.

Zones névralgiques de talents en IA dans le monde entier

Afin de fournir plus de contexte sur la façon dont la recherche sur l’IA est encouragée à travers le monde, nous examinons ci-dessous certains des pays qui, selon notre enquête, sont à l’origine de travaux à fort impact. Différents pays ont des approches différentes pour attirer et retenir les meilleurs talents, et nous décrivons quelques-unes de ces stratégies et approfondissons les données sur le plan national.

Asie

Chine

Nos données, qui proviennent exclusivement de LinkedIn et de conférences universitaires, comportent probablement un certain nombre de lacunes, et certains pays sont potentiellement sous-représentés dans le rapport. La Chine est la plus remarquable de ces omissions possibles: le taux de pénétration de LinkedIn en Chine n’est que de 3 %. Cependant, étant donné la nature hautement internationale de l’industrie de l’IA, il est possible que les experts de l’IA en Chine soient mieux représentés sur LinkedIn que les autres industries. Néanmoins, le tableau de la Chine dressé par les seules données de LinkedIn est sans aucun doute incomplet.

La représentation de la Chine dans les données de nos conférences est plus robuste. Environ 11 % de l’ensemble des auteurs des conférences ont reçu leur formation en Chine, et le même pourcentage d’auteurs travaillaient pour un employeur chinois. La Chine représentait environ 12 % des auteurs féminins de l’échantillon et 14 % des auteurs publiant la recherche à fort impact. Si l’on considère le nombre total global d’auteurs chinois qui ont publié lors des principales conférences universitaires en 2018, 13 % d’entre eux ont été inclus dans ce groupe à fort impact. C’est le même pourcentage qu’aux États-Unis. Parmi ces chercheurs les plus influents, neuf sur dix travaillaient dans le milieu universitaire, soit la proportion la plus élevée de notre échantillon.  

La Chine a un écosystème de publication actif, et les articles sont souvent publiés en mandarin plutôt qu’en anglais, la langue commune des conférences internationales. Il est donc possible que l’enquête sur les conférences universitaires internationales ne permette pas de saisir toute l’ampleur de la recherche ayant un impact en Chine, où le gouvernement a fait du développement de l’IA une priorité nationale et investit en conséquence. En juillet 2017, lors de l’annonce de son plan national de lutte contre l’IA, le gouvernement chinois s’est fixé comme objectif de devenir « le premier centre mondial d’innovation en IA », avec une industrie d’une valeur de 150 milliards de dollars, d’ici 2030.

Selon Kai-Fu Lee, ancien président de Google China et auteur de AI Superpowers: China, Silicon Valley and the New World Order, la Chine possède un certain nombre d’avantages en matière d’IA, dont une quantité considérable de données, son environnement entrepreneurial dynamique actuel et le soutien gouvernemental. En effet, le China AI Development Report 2018, publié en juin 2018 par l’Université de Tsinghua, affirme que la Chine est le chef de file mondial en matière de publications scientifiques, de brevets et d’investissement total en capital de risque liés à l’IA, mais qu’elle est à la traîne sur un aspect crucial : les meilleurs talents en IA. « Les pays en développement comme la Chine sont sous-représentés par les meilleurs talents de l’IA », selon le rapport. « Les États-Unis conservent leur avance […] dans le bassin de talents en IA de premier plan à l’échelle mondiale, d’après l’indice H13 », suivis du Royaume-Uni, de l’Allemagne, de la France, de l’Italie et de la Chine. En ce qui concerne l’ensemble des talents, cependant, le rapport affirme que la Chine se classe au deuxième rang, derrière les États-Unis. Néanmoins, il y a des indications que l’écart entre les deux pays pourrait se réduire rapidement : une étude récente publiée par l’Allen Institute for Artificial Intelligence a révélé que la Chine devrait devancer les États-Unis dans les publications à fort impact14 d’ici 2020. C’est peut-être l’une des raisons pour lesquelles la stratégie de la Chine en matière d’IA fait de la culture de talents de haut niveau une priorité majeure.

Une partie de cette stratégie semble consister à ramener les chercheurs chinois travaillant à l’étranger dans leur pays d’origine. En 2008, la Chine a mis en place le « Thousand Talents Program » (Programme des mille talents) visant à attirer des chercheurs étrangers et chinois travaillant dans d’autres pays. Offrant des postes de recherche distingués, des primes et des subventions, le Thousand Talents Program a créé des incitatifs pour attirer des milliers de chercheurs en Chine, la majorité d’entre eux venant des États-Unis. Parallèlement, plus de 300 « parcs d’entreprises » ont été construits pour accueillir les étudiants et les travailleurs revenant de l’étranger, selon le journal public China Daily.

Les données de la National Science Foundation des États-Unis montrent que, par rapport aux années précédentes, un pourcentage plus faible de doctorants chinois qui obtiennent leur doctorat aux États-Unis dans le domaine des mathématiques ou de l’informatique déclarent qu’ils prévoient rester dans le pays après avoir obtenu leur diplôme. Au cours de la période 2012-2015, 42 % des titulaires de doctorat non américains dans ces domaines étaient des ressortissants chinois, 87 % d’entre eux affirmant qu’ils avaient l’intention de rester et 57 % qu’ils avaient des plans précis de rester. Bien que le pourcentage de doctorants chinois dans ces domaines qui ont déclaré avoir l’intention de rester aux États-Unis après leurs études soit plus élevé que la moyenne de l’ensemble des pays,15 il a néanmoins diminué par rapport à la période 2004-2007, où 91 % des doctorants chinois en mathématiques et en informatique ont déclaré avoir l’intention de rester dans le pays après leur diplôme, et 65 % ont déclaré avoir des plans précis pour rester. Ces données suggèrent que les « tortues de mer » (c’est ainsi que les étudiants qui rentrent chez eux après une longue période d’études à l’étranger sont communément appelés en Chine) sont de plus en plus susceptibles de revenir avec des doctorats en mathématiques et en informatique décernés aux États-Unis.

Des plans de recrutement comme le Thousand Talents Program, conjugués aux nouvelles possibilités d’affaires offertes par l’investissement sans précédent de l’état dans l’IA, sont des facteurs motivants pour certains chercheurs qui envisagent de transférer leur laboratoire en Chine. Une autre considération peut être ce que l’on appelle le « plafond de bambou » : l’idée que, si les diplômés en STIM peuvent être facilement employés par des entreprises étrangères, ils peuvent ne pas gravir les échelons aussi facilement que certains de leurs collègues. Une étude réalisée en 2015 à partir des données sur l’emploi de Google, Hewlett-Packard, Intel, LinkedIn et Yahoo confirme cette hypothèse : bien que les Asiatiques représentent 27 % de la main-d’œuvre professionnelle dans ces entreprises, ils ne représentent que 14 % des cadres, selon cette étude.    

Singapour

Sur notre échantillon de plus de 36 500 profils LinkedIn, environ 2 % (607) étaient basés à Singapour. De ce groupe, 72 % ont déclaré avoir au moins six ans d’expérience et 93 % ont déclaré avoir au moins trois ans d’expérience.

Les auteurs formés à Singapour et/ou travaillant pour un employeur basé à Singapour représentaient 1 % de notre échantillon. De ceux-ci, 1 %  se sont qualifiés comme faisant partie des meilleurs talents. Cependant, lorsque nous avons comparé le nombre d’auteurs par rapport à la population, Singapour devançait tous les autres pays du monde, avec cinq auteurs présents aux conférences pour 100 000 personnes. Singapour était également un chef de file sur la question du genre avec  une proportion de 23% d’auteures féminines..

Grâce à l’accent qu’elle met sur la connectivité, le développement de Singapour en matière d’IA pourrait rapidement accélérer. ans le Global Smart City Performance Index 2017, qui évalue les villes en fonction de leur degré de connectivité en matière de mobilité, de santé, de sécurité publique et de productivité, Singapour a été classée première au monde dans chaque catégorie. Le 2018 Global Startup Ecosystem Report de l’entreprise en démarrage Genome a également classé Singapour parmi les « 10 meilleurs écosystèmes pour la connectivité locale ». Un rapport de 2017 de McKinsey sur l’IA en Asie du Sud-Est a révélé que parmi les pays qui composent l’Association des Nations de l’Asie du Sud-Est (ANASE), « Singapour est en tête de la région pour l’expérimentation avec l’IA dans de multiples industries ».16 Un exemple mis en évidence par le rapport est le plan Smart Mobility 2030 de Singapour, qui vise à utiliser l’IA pour l’optimisation en temps réel de la circulation des voitures, des autobus, des trains et des vélos.

En effet, le gouvernement de Singapour promeut activement l’IA. En 2017, la National Research Foundation de Singapour, qui établit le programme de recherche et de développement du pays, a annoncé l’AISG, une initiative quinquennale de 150 millions de dollars consacrée au développement de solutions d’IA. Un an plus tard, notant que « les conditions sont maintenant réunies pour que nous puissions passer à l’étape suivante de la transformation numérique du gouvernement », le Digital Government Blueprint de Singapour appelait tous les ministères à mettre en œuvre l’IA sur au moins un projet « pour la prestation de services ou l’élaboration de politiques » d’ici 2023.

Parallèlement, Singapour élabore des lignes directrices pour une mise en œuvre responsable de l’IA. En janvier de cette année, le gouvernement a présenté une première ébauche de son Cadre modèle de gouvernance de l’intelligence artificielle, demandant aux organisations de le mettre à l’essai et de fournir des commentaires pour les versions futures.

En février, la ministre responsable du Bureau du programme Smart Nation, Vivian Balakrishnan (qui est également ministre des Affaires étrangères), a annoncé que le pays allait « doubler » le budget consacré à l’IA dans le but de devenir un centre majeur pour le déploiement de cette technologie. Singapour investit également dans la formation et l’amélioration des compétences : l’initiative de l’AISG, « L’IA pour tous », par exemple, vise à enseigner l’apprentissage machine de base à quelque 10 000 personnes, allant des élèves du secondaire aux adultes actifs sur le marché du travail. « Nous ne nous attendons pas à ce que tout le monde devienne un expert de l’IA », a souligné Balakrishnan. « Mais l’IA […] est une technologie d’usage général, et nous voulons que notre main-d’œuvre soit en mesure d’utiliser [ces] outils pour participer de façon significative à l’économie de l’IA de demain. »

République de Corée

Sur notre échantillon de plus de 36 500 profils LinkedIn, environ un demi pour cent (192) était basé en République de Corée (où le site de réseautage n’est pas largement utilisé). Les auteurs formés en République de Corée et/ou travaillant pour un employeur basé dans le pays représentaient 2 % de notre échantillon.

La République de Corée fait des progrès notables dans le développement de ses capacités en matière d’intelligence artificielle, et ces investissements s’inscrivent dans la riche histoire du pays en matière de soutien à la recherche et au développement technologique. Cette année, par exemple, pour la sixième année consécutive, la République de Corée a été classée comme l’économie la plus innovante du monde, selon l’indice Bloomberg de l’innovation.

Cet engagement en faveur de l’innovation se reflète dans les récents investissements dans l’IA : en 2018, la République de Corée s’est engagée à allouer 2 milliards de dollars sur quatre ans à la recherche et au développement en matière d’IA dans le but de « se classer parmi les quatre meilleurs pays au monde en 2022 ». Le programme, vise à favoriser le développement de 1 370 chercheurs en IA, dont 350 devraient être considérés comme des talents de premier plan. Parallèlement à cela, quelque 4 500 bourses seront accordées à des étudiants qui étudient l’IA en République de Corée, et une formation accélérée de six mois sera offerte à environ 600 étudiants pour leur permettre de commencer à combler immédiatement leurs besoins en talents.

Australie

Nos données suggèrent que l’Australie est un nouveau centre névralgique de l’IA. Si l’on examine les chiffres globaux, environ 4 % (1 299 profils) de nos données LinkedIn étaient basés en Australie, et 3 % du nombre total d’auteurs des 21 premières conférences internationales ont reçu leur formation en Australie. Le même pourcentage d’auteurs travaillaient pour un employeur basé en Australie.

Toutefois, en ce qui concerne les recherches les plus importantes, l’Australie se classait au quatrième rang mondial pour le nombre de chercheurs. De l’ensemble de son bassin d’auteurs, 18 % (le plus élevé de tous les pays) ont été inclus dans cette catégorie à fort impact. Selon nos données, l’Australie est aussi l’un des pays qui attirent plus de talents qu’elle n’en perd au profit des entreprises et des universités étrangères.  

Amérique du Nord

Canada

Le Canada compte environ un dixième de la population des États-Unis, et sa représentation dans LinkedIn était à peu près proportionnelle, avec 1 487 profils indiquant qu’ils étaient basés au Canada. Si l’on examine les données provenant des  conférences, les chercheurs qui ont fait leur doctorat au Canada ainsi que ceux qui travaillent pour un employeur canadien représentaient environ 4 % de notre échantillon. Le Canada était un chef de file dans le domaine des talents de premier plan, avec le cinquième plus grand nombre d’auteurs ayant publié des travaux de recherche à fort impact.

Il y a toutefois des indices que l’écosystème canadien de l’IA est plus vaste que ce que cet ensemble de données pourrait laisser entendre et qu’il croît rapidement. Le gouvernement canadien a fait un investissement majeur dans l’intelligence artificielle en 2017, lorsqu’il a alloué 125 millions de dollars à la Stratégie pancanadienne en matière d’intelligence artificielle, une initiative visant à encourager le talent en intelligence artificielle. En 2018, notre recherche a révélé que le nombre de jeunes entreprises actives dans le domaine de l’IA au Canada avait augmenté de 28 % par rapport à l’année précédente, ce qui représente près de 650 jeunes entreprises dans tout le pays. Au cours de la même période, nous avons également noté le nombre croissant d’acteurs internationaux qui ouvrent des laboratoires d’IA dans certaines des villes les plus dynamiques du pays, dont Toronto, Montréal, Vancouver, Edmonton, Waterloo, Ottawa et Québec.  

États-Unis

Sur notre échantillon de plus de 36 500 profils LinkedIn, près de la moitié (15 747) étaient basés aux États-Unis. Une proportion notable de ces experts (environ un sur cinq) travaillent actuellement ou ont déjà travaillé pour Microsoft (1 077), IBM (667), Google (697), Amazon (511) et/ou Apple (393). Quatre-vingt-sept pour cent de ces profils ont au moins six ans d’expérience, et presque tous (97 %) disent avoir au moins trois ans d’expérience. Environ un tiers (36 %) des experts américains de ce bassin de talents travaillent dans la région de la baie de San Francisco.

En ce qui concerne les données des conférences, les États-Unis arrivent en tête de presque toutes les mesures en chiffres absolus. Les personnes formées aux États-Unis représentaient près de la moitié (44 %) des auteurs publiés dans l’échantillon. Quarante-six pour cent étaient employés par une entreprise ou une université établie aux États-Unis. Chez les femmes, ce pourcentage était encore plus élevé : sur les 4 085 auteures de notre ensemble de données, 1 960 (48 %) travaillaient pour un employeur établi aux États-Unis. Les auteurs travaillant dans un établissement américain représentaient 60 % (1 095) des chercheurs qui ont effectué la recherche la plus fructueuse, selon les citations reçues au cours des deux dernières années. Environ 13 % de l’ensemble des chercheurs basés aux États-Unis ont atteint ou dépassé le seuil pour se qualifier comme auteurs à fort impact. De ce nombre, 84 % travaillaient dans le milieu universitaire et 16 % dans l’industrie.

Il n’est pas surprenant que les États-Unis soient en tête selon plusieurs indicateurs. D’une part, les universités américaines continuent d’être à la pointe de la recherche fondamentale en IA. Selon Kai-Fu Lee, les États-Unis sont prêts à conserver un avantage mondial majeur en matière de « leadership en recherche » et d’enseignement supérieur pendant au moins les 30 à 40 prochaines années.

D’autre part, le gouvernement américain ainsi que les entreprises américaines, telles que Facebook, Apple, Microsoft, Google et Amazon  investissent massivement dans la recherche et le développement en IA. Depuis 2011, la majorité des investissements en capital de risque à des entreprises en démarrage dans le domaine de l’IA sont allés à ceux basés aux États-Unis, « tant en nombre de transactions d’investissement qu’en dollars US investis, représentant les deux tiers de la valeur totale des investissements », selon un rapport de l’OCDE de décembre 2018. L’armée américaine est également fortement investie dans l’IA : la Defense Advanced Research Projects Agency (DARPA), par exemple, a annoncé en novembre 2018 qu’elle affecterait 2 milliards de dollars sur une période de cinq ans à « des programmes nouveaux et existants pour créer la troisième vague de technologies d’IA ».

La région européenne

Sur notre échantillon de plus de 36 500 profils LinkedIn, environ 37 % (13 553) étaient basés dans la région européenne.17 Parmi ceux-ci, sept pays représentaient au moins 2 % de l’échantillon : environ 9 % (3 387 profils) étaient basés au Royaume-Uni, 4 % (1 426) en France, 4 % (1 351) en Allemagne, 3 % (975) en Espagne, 2 % (687) aux Pays-Bas, 2 % (681) en Italie et 2 % (625) en Suisse.  

Sur le nombre total de chercheurs ayant publié l’année dernière dans les 21 premières conférences, 27 % d’entre eux ont reçu leur formation dans la région européenne, et 25 % ont travaillé pour un employeur basé dans l’un des pays inclus dans ce groupe. Un quart (25 %) des chercheuses de notre échantillon travaillaient pour des employeurs basés dans la région européenne. Parmi les chercheurs à fort impact, 16 % d’entre eux travaillaient pour une entreprise basée dans l’un de ces pays.

L’Union européenne (UE) et plusieurs pays de la région européenne font d’importants investissements dans le développement des compétences et des capacités en IA. En 2018, la Commission européenne (CE) a déclaré qu’elle engagerait 1,5 milliard d’euros pour financer la recherche sur l’IA sur une période de deux ans dans le cadre du programme Horizon 2020, soit une augmentation annuelle de 70 %. Sur le plan national, les États membres allouent également des fonds à la recherche dans le domaine de l’IA : l’an dernier, au Royaume-Uni, par exemple, le gouvernement et le secteur privé ont fait équipe pour investir quelque 1 milliard de livres sterling dans la recherche sur l’IA. La France, quant à elle, a investi 1,5 milliard d’euros jusqu’en 2022. La CE devrait publier dans le courant de l’année un plan détaillant comment, de concert avec les États membres, l’Europe peut atteindre un investissement total de 20 milliards d’euros par an pour les dix prochaines années en matière d’IA.

Un rapport récent compilé par Charlotte Stix, associée de recherche au Leverhulme Centre for the Future of Intelligence de l’Université de Cambridge et conseillère chez Element AI, a révélé que l’exode des cerveaux constitue un défi pour la recherche en IA dans l’UE. Stix a également signalé un retard dans les investissements de capital-risque dans les entreprises en démarrage de l’UE, ce qui pourrait être un indicateur de l’évolution future des talents. Un rapport publié en 2018 par l’OCDE a montré que 8 % des investissements mondiaux en actions dans le domaine de l’IA sont allés à l’UE en 2017, contre 1 % en 2013. Entre 2011 et 2018, la majeure partie de ces investissements a été concentrée dans trois pays : le Royaume-Uni (55 %), l’Allemagne (14 %) et la France (13 %). Malgré ces tendances, l’examen par Stix de l’écosystème de l’IA de l’UE montre clairement que l’Europe est prête à devenir un chef de file mondial en matière d’« IA éthique », notamment grâce au développement continu de lignes directrices, de cadres et de règlements pertinents et appropriés (par exemple, le Règlement général sur la protection des données18). Le groupe consultatif indépendant de la Commission européenne, le groupe d’experts de haut niveau sur l’IA, en est un bon exemple.19 Ce groupe, composé de 52 experts, est chargé de rédiger des recommandations pour l’élaboration d’une nouvelle politique sur l’IA et les questions éthiques, juridiques et sociétales connexes.    

Conclusion

Notre rapport mondial 2019 sur les talents en IA témoigne d’une croissance et d’une expansion notables, tant sur le plan de l’expertise autodéclarée en IA que du nombre d’auteurs et d’articles scientifiques à fort impact publiés dans ce domaine. Les femmes continuent d’être sous-représentées, mais certains pays sont plus près d’atteindre la parité entre les genres que d’autres. Si l’on considère la répartition géographique des talents, les États-Unis sont en tête en chiffres absolus pour presque tous les indicateurs. Pourtant, le domaine est incontestablement international, alors que chaque écosystème local est caractérisé par ses propres forces et stratégies. Les pays qui se concentrent sur le développement de cette expertise contribuent à accroître le bassin mondial de talents en IA nécessaires pour faire progresser le domaine.

Rédigé avec Grace Kiser et Yoan Mantha

Recherche de Yoan Mantha

Visualisation de données par Santiago Salcido

Traduction de l’anglais au français par Melissa Guay

Site web et conception visuelle par Doriane Soulas, Benoit Lavoie-Lamer, Morgan Guegan, Kayla Gillis, Vincent Caruana, Wei-Wei Lin et Genevieve Jacovella Remillard

Un merci tout spécial aux collègues chez Element AI qui nous ont fourni leurs précieux commentaires :

Adélaïde Andriot | Caroline Bourbonnière | Chang Sub Chang | Kevin G. Clark | Christophe Coutelle | Sabina Dessertine | Guillaume Gagnon | Paul Gagnon | Peter Henderson | Simon Hudson | Valérie Lafontaine | Clare Lee | Vyara Ndejuru | Lara O’DonnellMarc-Etienne Ouimette | Clement Soh | Charlotte Stix | Jeffery Yune

  1. Un grand merci au Bureau du Scientifique en Chef d’Element AI, qui nous a aidés à cibler ces conférences.
  2. Tous les doublons ont été supprimés de cet ensemble de données.
  3. À deux exceptions près : nous n’avions pas accès aux données de la NAACL pour 2017 et 2018 ni aux données de l’ICCV, une conférence semestrielle, pour 2016 et 2018.
  4. Dans les cas où il y avait une divergence dans les métadonnées, nous avons examiné les profils et ajouté l’information manuellement.
  5. Malheureusement, nous n’avons pas été en mesure de prendre en compte les genres non binaires dans ce rapport, mais nous espérons développer une approche plus inclusive dans nos travaux futurs
  6. Ce groupe comprend tout pays comptant 150 auteurs ou plus dans notre échantillon. Ces pays sont : l’Allemagne, l’Australie, le Canada, la Chine, la République de Corée, la Chine, l’Espagne, les États-Unis, la France, l’Inde, l’Israël, l’Italie, le Japon, les Pays-Bas, le Royaume-Uni, Singapour, la Suède, la Suisse, Taiwan, le Royaume-Uni et les États-Unis.
  7. Ces observations sont limitées étant donné la portée étroite de l’enquête et la myriade de variables qui n’ont pas été prises en compte, notamment le PIB, la citoyenneté, le nombre total de doctorants par pays et la politique d’immigration.
  8. Remarque : Cela n’inclut que les pays pour lesquels il y avait suffisamment de données pour obtenir une signification statistique.
  9. Un grand merci au Bureau du Scientifique en Chef d’Element AI, qui nous a aidés à définir cette tâche. Nous avons examiné les citations de 2017 et 2018, plutôt que l’indice H, car nous voulions tenter de saisir du mieux que nous le pouvions l’impact actuel des chercheurs, plutôt que sur la totalité de leur carrière. Nous avons compté les citations pour toutes les publications de 2017 et 2018 et défini le seuil comme le point d’inflexion du nombre trié de citations pour chaque publication.
  10. Il est à noter que notre méthodologie ne nous a pas permis de distinguer les affiliations doubles.
  11. Un grand merci à l’équipe de talent d’Element AI, qui nous a aidés à définir ces termes de recherche.
  12. Notez que sur LinkedIn, les utilisateurs ont la possibilité d’énumérer plusieurs domaines d’études, et en fait plusieurs des profils comprenaient plus d’une discipline universitaire.
  13. L’indice H, une mesure de l’impact scientifique d’un auteur, est défini comme « le plus grand nombre de publications d’un scientifique qui ont reçu h ou plus de citations chacune alors que les autres publications n’ont pas plus de citations h chacune ».
  14. Dans ce cas-ci, l’expression « à fort impact » a été définie comme étant le premier 10 % des articles selon le nombre de citations.
  15. Parmi l’ensemble des étudiants étrangers qui obtiennent un doctorat aux États-Unis dans le domaine des mathématiques ou de l’informatique, plus de 79 % ont déclaré qu’ils avaient l’intention de rester aux États-Unis et 53 % qu’ils avaient des plans précis pour y rester, selon la National Science Foundation.
  16. L’ANASE comprend le Brunei, le Cambodge, l’Indonésie, la Malaisie, le Myanmar (Birmanie), les Philippines, Singapour, la Thaïlande et le Vietnam.
  17. Dans ce rapport, ce que nous appelons la « région européenne » ne se limite pas aux États membres officiels de l’Union européenne. Nous incluons les pays non membres de l’UE suivants, dont beaucoup sont activement impliqués dans des programmes et initiatives européens : Albanie, Belarus, Bosnie-Herzégovine, Islande, Israël, Kosovo, Macédoine, Moldavie, Norvège, Russie, Serbie, Suisse, Turquie et Ukraine. Le Royaume-Uni fait également partie de ce groupe.
  18. Le règlement général sur la protection des données (RGPD) est l’une des principales lois de l’UE en matière de protection des données et de la vie privée, qui est entrée en vigueur en mai 2018.
  19. Divulgation : Je suis membre du groupe d’experts de haut niveau sur l’IA.